Je me précipite vers la casserole où du lait, bouillant, déborde. Je coupe le gaz, me brûle au passage, mort ma lèvre inférieure. Elle n'a pas bougé. Assise sur une des deux seules chaises qui nous appartiennent. « Je vivrai sans que mon coeur batte, sans avoir de coeur. » souffle-t-elle. Je lève un sourcil. Faire semblant. Que ce n'est pas important. Je soutiens « Je vais t'aider, moi. » Elle a des yeux qui me tuent. De beaux yeux. Des yeux de lynx malheureux. Elle a mal. Je la soigne. Interdiction de dire « Ça ira », alors je ne le dis pas. Elle tremble. Crise. Je sais. Je suis calme, il le faut. Jihad. Jihad mon animal sacré à moi. Jihad calme toi. Tu n'iras peut-être jamais plus loin que ces murs, mais t'y seras avec moi, hein, Jihad. Je t'aimerai. Non. Je te sauverai. T'inquiètes pas. Et ces gamins qui crèvent comme toi, ils seront là aussi. Bref, elle doit dormir. Elle dormira dans mes draps. Respiration régulière. Silence. C'est finit. Lire. Ce soir là, je dormirai imagé. Au près de Jihad, mon animal sacré, je rêverai d'un humain en transe, d'un lynx éventré, de millions d'oiseaux libérés. Et parmi cela, aucune place pour moi. Faire semblant. Non. Tout ça, ce n'est vraiment pas important.