Je descends les escaliers de l'immeuble d'un pas pressé, la soirée est déjà bien entamée. J'ai enfilé un bonnet sur ma tête trop blonde et j'ai enfilé un sweat pour ne pas souffrir du froid une fois dehors. Je marche dans les rues animées de Brooklyn. Peu importe l'heure ou la météo, y aura toujours du monde dehors, et c'est ça que j'aime. Je supporte pas vraiment le silence ou le calme, j'préfère quand y a du monde partout, quand on galère à circuler tellement la masse est épaisse, tu vois ? Je traverse rue et ruelle, je connais tout ce réseau de bitume par cœur. Normal, quand on livre des pizzas, on a le privilège d'être un gps humain. Ça doit être le seul point positif dans ce job pourrav'. Je circule donc, ombre parmi les ombres. Puis là, au détour d'une rue, je crois reconnaître une silhouette connue. Ouais, j'le reconnais, ce bonnet pas entièrement enfoncé sur la tête, des oreilles pointues de lutin qui dépassent des deux côtés, des fringues trop grandes pour un corps trop maigre. Izraël, ou le gars camé jusqu'à l'os. J'crois bien que depuis que j'le connais, j'l'ai jamais vu sans qu'il soit dans un état second ou à des miles de nous. Au début, j'avais pas trop l'habitude, j'étais limite pas à l'aise quand j'lui parlais, mais là je commence à m'y faire. C'était une question de temps, en fait. Je tends mon bras pour choper son épaule et le retourner vers moi. Salut, mec. T'as ingurgité quoi, aujourd'hui? je rigole un peu, puis esquisse un demi sourire. J'l'aime bien Iz, même si lui et moi mentalement comme physiquement on est l'image même du parfait contraste. J'suis dans l'genre large d'épaules et plutôt sain. Iz il est presque décharné à cause de toute la merde qu'il s'envoie. Pourtant j'ai jamais ressenti le besoin de lui tendre la main pour qu'il s'en sorte. Chacun son kiff, et ça c'était le sien, donc j'le jugeais pas. Il avait juste ving-deux piges et il était bientôt mort.

ils croyaient tous que j'étais un camé de base, drug men, décharnée jusqu'à la moelle. A vrai dire j'avais tiré que deux-trois fois l'opium wallah, lsd, joints pas des trucs trop forts, jamais de coke (ouais aze quelques fois), jamais de trucs trop durs, j'restais dans l'light. Si j'étais si light que ma came c'était à cause du manque de blé, j'étais pas si camé, enfin, je pense, zaama. Deux-trois pas dans la street, je connaissais tout le monde, tout le monde me connaissait, normal negga, j'étais Iz quoi, l'elfe au bonnet rouge. Putain, j'étais près à rouler un pilon c'était quoi cette masse qui me tapotait l'épaule putain si c'était un mexicain de merde inchallah qu'j'allais m'le faire sur la hass de ma gadji. Zaama j'me retourne et j'vois mon kho, ce grand nègre de Varsovie, Vega, "putain négro tu m'as fais flipper wesh, j'croyais pas qu'c'était un gars d'la mif quoi". Super feuf ce keumé, il me faisait dream comme peu d'autres, il était aussi sain qu'ma grand-mère il parlait ienb à l'opposer d'mon univers du bronx et de mon état d'esprit de désinvolte, mais j'l'accrochais bien ce nègre là. Pourtant sans être raciste ou quoi les nègres , les mexicains c'était pas mes feufs normalement, plus des sales feujs fin normal quoi, dès qu'j'en voyais un mon sang faisait trois fois l'tour de ma teub' et c'était la hass, mais lui il était soft, fresh. Fast life, je roulais mon joint, "aze tire une latte, c'est du natura 3000 t'inquiète c'est conseillé par le frenchie Hulo, sinon aujourd'hui j'ai bouffé un big mac pour répondre à ta question, j'suis cleany baby" c'était que de la salade hein.

Putain négro tu m'as fais flipper wesh, j'croyais pas qu'c'était un gars d'la mif quoi. je ricane. J'irais jamais lui casser la gueule à lui, j'aurais trop peur de le briser en deux. T'as vu la taille qui fait et l'épaisseur de ses bras, sérieux ? Tu lui mets un droite sa tête tombe quoi. Aze tire une latte, c'est du natura 3000 t'inquiète c'est conseillé par le frenchie Hulo, sinon aujourd'hui j'ai bouffé un big mac pour répondre à ta question, j'suis cleany baby. un sourcil se hausse. Ce mec va me pervertir sérieux. Imagine je supporte pas le truc et que j'fais un bad trip ou un truc dans l'genre. J'ai qu'une envie c'est de pas lui faire confiance, de lui dire, laisse tomber mec, moi j'prends pas ça. Mais j'ai pas envie de passer pour le faiblard de service qui a pas les couilles pour un pauvre joint. Je le prends entre mes doigts, m'arrange pour tirer une petite latte. Mec si j'vois des lapins roses ou alors que je gerbe à tes pieds, tu te prends un pain direct. je lui rend le oinj puis le regarde de haut en bas. Bien pour le big mac, tu devrais en prendre plus souvent j'te jure que ça t'ferait pas d'mal. Genre deux fois par jour, histoire d'avoir autre chose que d'la peau sur tes os. j'sais pas pourquoi les trucs illicites animaient en moi une espèce de peur, peut-être bien que j'avais envie de garder ce côté sain, qui m'empêchait de toucher à tout. Genre j'peux boire des litres je m'en fous, fumer aussi. Mais les drogues tout ça, c'est un terrain inconnu quoi. J'me suis pas renseigné sur les effets, parce que j'me suis toujours dis que j'pourrais jamais tomber là-dedans. J'aurais trop peur que ce soit le début de la fin. Les rumeurs, tout ça, ça m'a rendu un peu parano, pas tout à fait sûr de ce que je m'autorise à faire et à ne pas faire. On marche un peu Izzy ? Pas envie de crever de froid en restant là !

il saquait le oinj comme un zaama de pd putain le keumé savait pas pomper et goûter aux plaisirs de la putain de weed que j'avais mis dans le papier, "c'est pas en tirant comme ça comme une lopette que tu vas voir du lapin.. et t'inquiète je suis mince c'est parce que les thunes c'pas toujours ça". Wallah j'aimais pas qu'on se soucie de ma putain de life, walla radim il pouvait pas me faire ça ce keumé, j'aimais pas ça, mais j'le kiffais trop zaama c'était mon kho normal. Il tremblait sa tête passait au akhdar (vert), mon akh était mal il utilisait l'excuse du wsh j'me sens mal t'as vu on taille j'veux pas être malade, mais il était paumé, la drogue ça l'flippait autant qu'le Franprix pour ma jaddah (grand-mère), ienb le grand kho tout black de peau, tout musclé qui avait peur de putains d'ptites plantes vertes.. C'était la zerm à vrai dire, ouais, il avait raison fallait tailler, j'sentais le mauvais coup, la gadji qui débarque ou la hass de flicaille qui viendrait nous siffler notre -mon- herbe. Je commençais à courir zaama je le sentais mal, inchallah. Walla radim qu'j'entendais une putain de sirène, zaama que j'avais les couilles en perditions dans mon putain de calbut qui me maintenait pas la putain de paire de couilles qu'Allah m'avait procuré. "Mec t'es un niqué, j'ai 45g dans l'calbute, wsh, kho tu cours avec moi ou tu te planques ici" je détalais, j'flippais ma reum' on me prenait, j'faisais d'la taule avec les rats de merdes, les mexicanos et autres chintoks qui voient pas clair. Hass time.

C'est pas en tirant comme ça comme une lopette que tu vas voir du lapin.. et t'inquiète je suis mince c'est parce que les thunes c'pas toujours ça. ouais bah cimer je passe pas ma vie avec un joint entre les doigts, j’suis pas censé savoir ce qu’il faut et ce qu’il faut pas faire, il comprends pas bien le petit ou quoi ? En vrai j’me sens comme une daube de ce côté-là, pas une connaissance sur le sujet. Genre j’connais des noms de drogues, parce que j’suis pas non plus né de la dernière pluie, mais n’empêche que j’ai pris l’habitude d’avoir peur de ces machins-là. Izraël se met à courir, et j’le suis comme dicté par ses pas à lui. J’suis sûr qu’il flippe un peu. Mec t'es un niqué, j'ai 45g dans l'calbute, wsh, kho tu cours avec moi ou tu te planques ici. j’ai pas le temps de répondre qu’il va encore plus vite, j’le suis, le rattrape vite fait bien fait. Sirènes hurlantes dans les oreilles. En fait j’ai l’habitude de ces courses effrénées dans les rues, j’flippe tellement quand j’danse dans le fin fond des rues et que j’entends la voix tonitruante des flics qui nous demandent de dégager vite fait. Même pas l’temps de kiffer ce que je fais. Et là t’as plus rien d’autre à faire que d’partir en courant si tu tiens à tes fesses. Puis genre j’ai jamais compris leur blème contre nous, peut-être bien parce qu’on est pas tout à fait blancs ou une excuse de merde comme ça. Ça fait déjà longtemps qu’on court, je pousse Izraël dans un recoin sombre d’une ruelle, me jette dans ce coin-là aussi. Je me ramasse un peu, il y avait un vieux truc par terre. Bah putain, ça m’avait pas manqué ça. je me tiens dos au mur, les yeux vers le ciel, je reprends mon souffle. T’es vraiment une mouche à merde Izzy. je soupire.